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L'e-pub fête ses 5 ans

La publicité online date en France de 1997, année où les premiers investissements en communication étaient réalisés sur le Web. Depuis l’e-publicité n’a cessé évoluer pour devenir un secteur à part entière, avec ses règles et ses outils. Tous les analystes s’accordent d’ailleurs à pronostiquer de belles perspectives à la communication online ; d’ailleurs, tous les indicateurs sont bons. Malgré cela, l’e-pub accuse quelques faiblesses...

1. Des signes de maturité

La publicité online a bien évolué en 5 ans : globalement, elle s’est professionnalisée, a trouvé une légitimité dans le secteur des médias jusqu’alors détenu par les 5 grands médias (presse, TV, radio, affichage et cinéma). Ainsi les formats se sont-ils rapidement normalisés, et les outils dédiés à ce nouveau secteur ont fait leur apparition, donnant pour la première fois à un média, le véritable statut de technique de marketing direct.

Après une crise assez meurtrière pour les TIC, qui a logiquement ralenti l’activité de communication online, celle-ci peut tout de même se prévaloir d’avoir détrôné le cinéma en 2000 à la 5ème place des investissements publicitaires consentis dans les médias. Le secteur, en phase de concentration, devrait normalement continuer à croître, dans le sillage d’un secteur de l’e-commerce qui affiche toujours des taux de croissance indécents.

1.1. Des formats standardisés

Pour devenir réellement professionnel, le secteur de la publicité on-line du mettre un terme à l’anarchie des tailles de bandeaux qui régna un temps. Avant la normalisation par l’Internet Advertising Bureau, on ne comptait pas moins de 400 tailles différentes. Les sites Internet comprenant leur intérêt à normer leur nouvelle activité de support adoptèrent rapidement les 8 formats conseillés par l’IAB. Cela eut pour conséquence d’alléger le travail des agences de création qui jusque là devait adapter chaque création à chaque support, d’alléger finalement le coût de l’achat d’espace, et d’accélérer les délais de mise en place des campagnes.

Les technologies quant à elles se développèrent et se standardisèrent dans les browsers, ce qui permit aux créations d’être plus séductives, imaginatives, et performantes. Des nouveaux formats purent ainsi se généraliser, et offrir aux internautes un contenu publicitaire varié. Les "technologies" DHTML ou Flash sont maintenant bien connues et régulièrement utilisées, même si elles ne sont pas toujours très bien employées (le DHTML, mal réalisé, est souvent perçu par les internautes comme intrusif).

L’IAB continue de travailler sur ces formats, collant ainsi étroitement au marché, ses attentes et ses évolutions naturellement très rapides. Voici quelques mois, l’IAB a ainsi ajouté quelques recommandations sur les nouvelles tailles d’encarts publicitaires, et regarde actuellement quant à sa standardisation (voir article sur la standardisation du Web).

1.2. Des outils professionnels de mesure

Apparus dès 1998, les outils de gestion de campagne se sont révélés nécessaires pour permettre à la publicité online d’assurer ce qu’elle prétendait : gérer efficacement les espaces sur les supports et en mesurer la performance en temps réel sur la base de statistiques exhaustives.

Avant l’apparition de ces outils, chaque site Internet était muni de compteurs, qui avaient pour unique rôle de mesurer le nombre de pages vues. A l’époque, les sites Internet n’avaient aucune possibilité de cibler les espaces, d’accepter la rotation des bandeaux publicitaires, de mesurer réellement l’affichage ni la performance de campagnes dont les budgets dépassaient très rarement les 100 000 FF. Avec l’augmentation et la multiplication des budgets alloués au Web, ces outils devinrent rapidement nécessaires à tout site voulant prétendre vendre son espace publicitaire. Parmi ceux-ci, 2 outils se sont imposés comme références : DART de DoubleClick, et OpenAdStream de RealMedia.

Plus d'informations sur les outils de mesure

1.3. Un début de concentration

Le secteur de l’e-publicité est structuré comme les autres médias, à ceci près que les acteurs sont bien plus nombreux. Avec un chiffre d’affaire sectoriel équivalent à celui du cinéma, qui compte 2 régies principales, l’Internet affiche plus d’une centaine de régies (soit 50 fois plus) en France. Ceci pose quelques problèmes en terme de média-planning.

Mais un phénomène de concentration s’est amorcé depuis quelques mois, comme l’attendaient de nombreux acteurs du marché. Numériland s’est rapproché de ComClick, Wanadoo a racheté les activités de Axidium Espace, DoubleClick Europe a fusionné avec AdLink, 24/7 s’est retiré d’Europe, ce qui a eu pour effet d’améliorer la rentabilité de ces sociétés, d’homogénéiser leurs offres et d’asseoir une position sinon mondiale, au moins européenne. Ces prochains mois seront logiquement marqués par des disparitions et des rapprochements de régies, qui fédèrent en général quelques sites puissants, et une majorité de petits sites spécialisés.

Parallèlement à ce phénomène, de nombreuses régies se constituent régulièrement (TravelPrice par exemple, vient de se constituer une régie interne pour miex "répondre aux problématiques publicitaires des annonceurs (image, marketing relationnel...) et proposer des campagnes événementielles [...]"). Il s'agit de sites puissants et spécialisés, se séparant de leur régie dans l'optique de pouvoir tirer des bénéfices d'une internalisation ; la régie externe ne répond en effet que partiellement aux attentes de leurs supports, en proposant souvent aux annonceurs des modèles de campagne formatés, peu personnalisés, et donc moins valorisés que ce que les supports pourraient attendre. Le nombre de régie est en définitive assez stationnaire depuis quelques années et devrait le rester encore lnongtemps, même si la structure du marché continue d'évoluer...

1.4. Des prix stabilisés

Voici encore quelques mois, les tarifs publicitaires étaient relativement élevés, justifiés par les extraordinaires possibilités de ce nouveau média qui permet notamment une finesse ciblage et une analyse des performances en temps réel. Les espaces classiques se négociaient à 150 F du CPM, là où ils s’achètent maintenant à 5 euros. Que s’est-il passé ?

Premièrement, l’éclatement de la bulle boursière et l‘arrêt brutal de tout investissement publicitaire de la part des dot-coms ont rendu sa flexibilité aux prix, qui s’est effondré. Deuxièmement, les annonceurs traditionnels, à qui on avait prévu monts et merveilles de la publicité on-line, apprenaient à leurs dépens que la publicité on-line mal réalisée obtient une performance moyenne de ... 0,5%, qu’elle s’avère chère, et pas forcément efficace.

Aujourd’hui stabilisés, les tarifs des espaces publicitaires ont tendance à se retrouver des valorisations intéressantes, notamment par le biais des nouvelles technologies et des nouveaux formats plus performants que par le passé.

1.5. Des revenus provenant des entreprises traditionnelles

Au plus fort de l’activité de la publicité on-line, les annonceurs « pure web » représentaient une part très importante des investissements en e-communication (cette part approchait les 80% lors des mois d’euphorie). La machine s’alimentait d’elle-même, en quelque sorte.

Depuis l’éclatement de la bulle boursière, les sociétés Internet ont cessé de dépenser des millions dans des campagnes sans lendemain. Les sociétés traditionnelles quant à elles ont découvert la puissance de ce média, ses multiples facettes, ses réponses adéquates aux objectifs de communication, quels qu’ils soient. La proportion s’est inversée voici quelques mois, ce qui permet à la publicité on-line de redémarrer sur des bases fiables, avec des taux de croissance réguliers sur du moyen terme.

1.6. De bons indicateurs pour l’e-pub et l’e-commerce

Pendant quelques années, la publicité on-line a affiché un taux de croissance à 3 chiffres. L’année 2001 a marqué un tournant dans ce secteur, qui a affiché en France une diminution de 17% des investissements publicitaires. Pour autant, tous les analystes prévoient un redémarrage pour 2002 et tablent sur une croissance de 30% en moyenne par an sur les 5 prochaines années (voir article). Les projections à moyen terme prévoient d’ailleurs que les investissements publicitaires sur Internet rattrapent ceux consentis sur la radio (voir article de 1999, qui reste juste même si les délais sont nettement rallongés...). Quand aux supports numériques dans leur globalité, ils devraient détrôner à terme la TV.

Quant à l’e-commerce, il continue de progresser, grâce à plusieurs facteurs : psychologiques (il faut attendre plusieurs mois d’apprentissage de l’Internet avant d’avoir confiance et acheter ; plus le consommateur est expérimenté sur le Web, plus son panier moyen augmente), technologique (le haut débit, les nouveaux navigateurs plus faciles d’utilisation, la généralisation de la vidéo et de la 3D, les nouveaux moyens de paiement on-line, etc.), structurels (le nombre d’internautes continue d’afficher un taux de croissance à 3 chiffres) favorisent cette croissance.

1.7. Efficacité prouvée

L’Internet est un nouveau canal de communication des entreprises vers leurs cibles. Depuis sa création et son statut de média, quelques études portent à croire que l’e-publicité n’a rien à envier de l’efficacité des autres médias, dits traditionnels. La publicité sur Internet offre d’ailleurs beaucoup plus d'intérêt pour les consommateurs que ce qu’on pourrait penser : voir article de février 2002.

Les analyses qualitatives de performance montrent que la publicité est très efficace, seule ou en couplage avec d’autres médias. Nous citerons l’étude de DoubleClick sur différentes tailles d’espaces publicitaires (LDIcom01-07-23.php), ou encore l’étude comparative d’efficacité publicitaire entre l’Internet, la presse et la télévision (voir article de février 2000).

1.8. Des innovations intéressantes

Des services « pure-web » ont ainsi émergé, apportant intelligence, efficacité et avantages impossibles dans la vie réelle : relative exhaustivité de l’offre, diffusion instantanée de l’information... Les moteurs de recherche bien entendu, le forum, les services d’aide à l’achat, en sont de bons exemples.

En ce qui concerne la publicité, l’Internet s’inspire beaucoup de la presse et de l’affichage dans ses principes d’exposition. Néanmoins, grâce à un support numérique par définition très souple, Internet a aussi inventé ou réinventé quelques techniques, alliant souvent son action média et marketing direct, diffusion de l’image et recrutement de clients, comme l’affiliation, le bandeau HTML, que l’on peut facilement imaginer transposé prochainement sur la TV...

Pourtant certains commencent à réagir, à trouver les modèles sinon peu cohérents, au moins perfectibles (voir article d'avril 2002), et force est de reconnaître que ce secteur n’a pas encore atteint sa pleine maturité.

2. Des faiblesses

En 1994 apparaissait le premier bandeau publicitaire, de format 468x60, qui allait devenir rapidement le standard la publicité sur Internet. Une technologie existait à l’époque, et une seule : le Jpeg, un format statique, aujourd’hui complètement désuet pour la publicité.

Cinq ans plus tard, les technologies ont très nettement évolué et l’expérience des professionnels est... plus vieille de cinq ans. En fait, tout est réunit pour que les publicités soient efficaces et perçues par les consommateurs comme utiles, que les dispositifs publicitaires soient en adéquation avec les objectifs de campagne, que les supports favorisent certains formats non polluants au détriment d’autres mal perçus.

2.1. Des formats mal employés

Alors qu’il existe une multitude de taille d’objets publicitaires et de nombreuses technologies, plus de 70% de l’e-pub passent encore par ces bandeaux au format très (trop) standard de 468x60, en général associés au Gif animé, mais très limité.

Les formats flash en layer (DHTML) qui viennent se superposer à la page, les technologies comme enliven ou encore eyeblaster pourraient pourtant souvent mieux répondre aux attentes des internautes, donc des annonceurs... Les agences sont à certes à blâmer pour ne pas montrer plus de créativité, mais les supports ne le sont pas moins : l’alternative la plus souvent proposée est le pop-up (voire le pop-under), format pourtant très mal perçu par les internautes, notamment les internautes les plus aguerris donc les plus consommateurs on-line.

Le contexte de lecture sur les supports a aussi son importance ; pourtant, nombreuses sont les créations affichées sur des espaces inappropriés donc inefficaces. Loin d’être anodine, la perception négative ressentie par les internautes vis-à-vis des formats dits « polluants » joue en défaveur de la marque, peut nuire à son image lorsque les internautes sont lassés voire agacés. Et ils le sont, manifestement... Un sondage sommaire (non représentatif, mais assez révélateur) réalisé sur les lecteurs de bigben-pub (pourtant en majorité intéressés par l’e-pub :-) a même montré que plus de 80% des internautes ont une perception négative de la publicité (qui la trouvent plus encombrante ou dérangeante, que bien employée ou informative).

2.2. Des prix encore mal fixés

A cause de l’extrême concurrence qui règne dans le secteur de la publicité on-line, les prix n’ont plus beaucoup de relation avec ceux obtenus après négociation. En effet, le prix payé est souvent 50 à 80% inférieur aux tarifs bruts affichés dans les CGV (Conditions Générales de Vente). Cela ne va pas dans le sens d’une totale transparence...

Il existe parallèlement un problème de valorisation de l’espace selon la taille réservée à la publicité. En effet, le tarif entre une bannière 468x60 et un bouton 88x31 n’est souvent pas proportionnel ; or ce devrait être le cas. Mais il est difficile de comparer aisément les prix sur deux tailles d’espaces différents. Un nouvel indice permettrait de résoudre ce problème d’échelle, le CMP (Coût par Millions de Pixels)... indice qui n’est pas encore utilisé par les acteurs du marché. Là encore, problème de transparence des prix.

2.3. L’achat au clic, une solution ?

Confrontés à la baisse de la performance des espaces publicitaires (entendons, la baisse du taux de clic...), les annonceurs utilisent de plus en plus l’achat au clic. Bien que ce type d’achat soit encore très minoritaire, il semble se développer petit à petit. La promesse de ce type d’achat est en effet simple, et la performance connue a priori. Or les possibilités de fraudes nombreuses, et la performance réelle difficile à mesurer (voir l'article sur l'affiliation et l'article sur les erreurs du marketing online).

Les supports publicitaires acceptant la facturation au clic, majoritairement les sites persos, ont tendance à pousser au clic. Le procédé est connu, tant et si bien que certains voudraient mettre en place la facturation « clic + une page vue minimum ».

Sauf dans certains cas, sur certains supports ou pour certains objectifs publicitaires très particuliers, l’achat au clic est à déconseiller. Il prouve l’immaturité et le peu de professionnalisme de ceux qui l’adoptent, préférant acheter des visiteurs comme on achète du bétail plutôt que de définir avec méthode les espaces les plus performants pour l’annonceur. Que ce soit en terme d’image (l'achat au clic se pratique notamment sur les sites personnels) ou en terme « de l’intérêt du visiteur qui a cliqué » (certains sites poussent au clic), l'annonceur a rarement intérêt à opter pour cette solution, sinon à générer du trafic partiellement artificiel.

Conclusion

Les possibilités de l’Internet et de tous les médias numériques en matière de communication sont bien plus étendues que sur n’importe quel support : diffusion du message 24h/24, accès ludique ou professionnel, ciblage par CSP ou contexte de lecture, interactivité, analyse en temps réel des performances, optimisation dynamique des créations publicitaires, etc.

Pour satisfaire aux attentes des consommateurs sur Internet, donc pour être efficace, la publicité se doit d'être informative. Son affichage doit correspondre au contexte de lecture des internautes ; à défaut, elle aura tendance à être perçue comme polluante.

Toutes les analyses prévoient une croissance importante de la publicité numérique, tout support confondu : Internet, TV interactive, PDA, Téléphone mobile. Pour l’instant, la rentabilité relativement faible de tous les acteurs et la faiblesse des investissements financiers depuis le krach boursier de 2000, pénalisent ce marché ; lequel devrait, à moyen terme, devenir la base technique et expérimentale de quasiment tous les supports publicitaires (TV, radio, affichage...). A bon entendeur.