[page précédente


Edito de Cybermercatique sur l'e-pub

L'évolution passée et présente des revenus publicitaires nous donne à réfléchir sur l'influence de la publicité en ligne dans la stratégie médias des annonceurs.

Quant aux nouvelles recommandations de l'IAB France, sachant qu'elles résultent d'une large consultation auprès des régies publicitaires, elles ne peuvent qu'avoir des effets sur les décisions des acteurs de la cyberpublicité, qu'ils soient annonceurs, agences Web, centrales d'achat, etc.
Il est toujours difficile de faire des prévisions quel qu'en soit le sujet. En matière de publicité en ligne, l'exercice est même périlleux ; combien d'experts se sont-ils déjà trompés ? Faut-il, pour autant, abandonner toute tentative de prévision ? Non, bien sûr, au contraire ! C'est en période de turbulence, on le sait, qu'il est nécessaire de faire le point, de choisir un cap et de s'y tenir, quitte à le modifier, plus tard, pour mieux s'adapter à la situation du moment. Aussi, faut-il prendre en considération avec sérieux les derniers chiffres qui viennent d'être publiés, notamment par l'Interactive Advertising Bureau.

L'évolution passée et présente des revenus publicitaires nous donne à réfléchir sur l'influence de la publicité en ligne dans la stratégie médias des annonceurs. Quant aux nouvelles recommandations de l'IAB France, sachant qu'elles résultent d'une large consultation auprès des régies publicitaires, elles ne peuvent qu'avoir des effets sur les décisions des acteurs de la cyberpublicité, qu'ils soient annonceurs, agences Web, centrales d'achat, etc.

1- L'évolution des revenus publicitaires sur Internet

Le 16 novembre 2001, à la publication de l'étude IAB-PricewaterhouseCoopers, le ralentissement prévisible des investissements publicitaires sur Internet fut, malheureusement, vérifié. Il est, néanmoins, moins brutal que certains observateurs l'avaient prédit.

Le montant des investissements nets, déclarés et certifiés par les régies, s'élève, en France, à 558 millions de francs (85 millions d'euros) au premier semestre 2001. Montant sensiblement identique à celui qu'il était au premier semestre 2000, mais en recul par rapport au deuxième semestre 2000.

Les investissements publicitaires ont, toutefois, diminué de 14% entre le 2ème semestre 2000 et le 1er semestre 2001. Cette baisse, la première dans l'histoire de la publicité en ligne, est remarquable par son ampleur. Est-il nécessaire de rappeler que l'e-pub a connu des taux de croissance de 284 % en 1998 et, même, de 353 % en 1999 ?

Nous avons suffisamment évoqué les causes de ce repli pour ne pas y revenir : baisse du taux de clics, concurrence entre les différents médias, baisse des investissements publicitaires globaux des annonceurs, mauvaise conjoncture internationale, crise boursière, crise spéculative sur les valeurs Internet, etc. En revanche, nous ne pouvons pas ne pas souligner deux points importants :

  • le premier est que ce repli des investissements est antérieur à celui de la croissance économique que les organismes statistiques nous révèlent parcimonieusement comme pour ne pas trop nous inquiéter, qu'il est, de plus, antérieur à la tragédie du 11 septembre 2001 dont les conséquences économiques sont difficilement prévisibles à moyen terme, l'hypothèse d'une récurrence étant malheureusement la plus probable.
  • La deuxième remarque à ne pas taire est que si les revenus publicitaires sur douze mois sont stables, ce n'est que grâce à un bon deuxième semestre 2000 qui a connu une progression des investissements de 16% par rapport au premier semestre 2000. Par contre, le marché de l'e-pub a reculé fortement au cours du premier semestre 2001 : - 14% par rapport au premier semestre 2001.
En outre, comme le note Tuyen Vu, Senior Manager chez PricewaterhouseCoopers, " on relève une saisonnalité atypique avec une inflexion des investissements inhabituelle au début du deuxième trimestre mais une reprise amorcée dès le mois de juin ".

Autrement dit, la fin du premier semestre 2001 est meilleure que le début et la publicité sur Internet n'a pas profité d'une période de l'année qui lui est normalement faste. Sachant que les mois d'été sont, tous médias confondus, des mois plutôt creux et connaissant les effets dévastateurs des événements de septembre 2001, seuls de très bons résultats, toutefois improbables, au cours du dernier trimestre 2001 pourront éviter une baisse estimée entre 15% et 20 % du marché de l'e-pub en 2001.

Le scénario d'une reprise en fin d'année 2001 n'est pas totalement déraisonnable. Comme l'écrivent Bertrand Bathelot et Stéphane Carpentier (2001) " Internet est le média sur lequel la variation d'activité liée à la fin d'année est la plus forte. Deux facteurs jouent en ce sens : d'une part, le commerce électronique se prête très bien à l'achat cadeau et, d'autre part, c'est un média qui comporte toujours un très large volant d'espaces publicitaires invendus qui permettent d'aborder facilement le surcroît de demande saisonnier des annonceurs ".

Avant même la fin de la période des fêtes, la publication des résultats provisoires, et déjà exceptionnels, des ventes des cybermarchands tels que Yahoo.com, Amazon.com et du cybermarché britannique Tesco (voir la revue de presse de l'Agora de la Cybermercatique) laissent à penser que le cybercommerce français pourrait être l'un des moteurs de la reprise de la publicité en ligne. La perspective, maintenant réaliste, d'une rentabilité, même minime, stimule, en effet, les investissements publicitaires.

2- Internet est le 6ème grand média

L'une des questions qui revient souvent est de savoir si Internet est un média de communication de masse ou non.

La communication de masse est, selon Judith Lazar (1991), " le processus social particulier qui se réalise en faisant appel à la masse de l'audience, aux communicateurs et à la pratique communicationnelle ". La masse est composée d'individus anonymes, de niveaux socio-économiques et culturels différents, dispersés dans l'espace, peu ou pas organisés, ayant peu d'interaction. Ses caractéristiques essentielles sont l'ampleur, l'hétérogénéité et l'anonymat ; les individus la composant étant inconnus des communicateurs, c'est-à-dire de ceux qui travaillent pour les médias.

Ces trois caractéristiques s'appliquent à l'audience des mass médias, du mot latin media (moyens) et du mot mass (grande quantité) dans lesquels on retrouve les cinq grands médias publicitaires : la presse, la radio, la télévision, l'affichage, le cinéma.

L'utilisation par un annonceur de l'un ou de plusieurs de ces grands médias constitue une publicité média (" above the line advertising). Cette dernière se distingue de la publicité hors média (" below the line advertising ") qui emploie d'autres moyens que les grands médias : par exemple, la publicité directe, le marketing téléphonique, la P.LV. ou publicité sur le lieu de vente, le sponsoring, etc. En conséquence, si l'on reprend les caractéristiques des médias de communication de masse, les mass média, et qu'on les confronte à celles d'Internet, les différences sont nettes bien qu'Internet s'en rapproche sur certains points :
  • Internet est un média mondial à audience forte, hétérogène et dispersée physiquement.
  • En revanche, il s'en distingue par l'interactivité (la relation entre l'homme et la machine) et l'interaction (les relations entre les individus) mais aussi par le fait que l'anonymat vis-à-vis des communicateurs n'est pas garanti.
Les grands médias fonctionnent à sens unique, de l'émetteur vers le récepteur, en mode " push " alors qu'Internet, " média polyvalent, peut être " pull " et " push ", sachant que l'attente des internautes l'oriente plus vers une communication demandée qu'une communication imposée " (J. Lendrevie in François-Xavier Hussherr, 2000).

Jacques Lendrevie en concluait qu'Internet peut "réussir la quadrature du cercle : devenir un média de masse individualisé ". Or, au moins trois faits récents prêchent en faveur de la reconnaissance d'Internet comme 6ème grand média.

a) Des revenus publicitaires plus élevés sur Internet qu'au Cinéma

Avec ses 85 millions d'euros, la cyberpublicité représente, au premier semestre 2001, environ 1,19 % du marché publicitaire global estimé à 47 milliards par la Secodip. La part de la publicité en ligne dans les revenus publicitaires générés par les différents médias est donc en constante augmentation : elle est passée de 0,15 % en 1998, à 0,52 % en 1999, pour dépasser le seuil des 1% au premier semestre 2001. Cette tendance confirme la place d'Internet devant le média Cinéma dont la part fluctue, selon les années, entre 0,4% et 0,8% du marché publicitaire.

b) Internet : un média à intégrer dans un plan pluri-média

Au delà de ses considérations statistiques, Internet semble de plus en plus considéré comme un média complémentaire à intégrer dans un plan pluri-média associant tout ou partie des cinq grands médias historiques : la presse, la télévision, la radio, l'affichage et le cinéma. L'étude de l'IAB d'IPSOS-ASI (septembre 2001) conclut, en effet, qu'" intégrer Internet dans un plan pluri-média permet d'enrichir la relation à la marque" et met en évidence que la cyberpublicité contribue à l'image de marque, en relais de la campagne hors ligne. L'étude IAB/Ipsos-Asi montre, en outre, les effets positifs d'un plan pluri-média associant Internet à d'autres grands médias sur le comportement des internautes qui se manifeste par une augmentation de la prédisposition à l'achat.

c) Internet : un média utilisé par les annonceurs traditionnels

En quelques années, la répartition des investissements par types d'annonceurs a considérablement changé. Alors que les annonceurs traditionnels (dans les autres grands médias) ne faisaient que très peu de publicité en ligne, laissant aux entreprises de la nouvelle économie se tailler la part du lion, ils furent nombreux à intégrer Internet dans leur stratégie médias, dès le 1er semestre 2001.

C'est d'ailleurs, grâce à cette arrivée des annonceurs traditionnels sur le marché, que l'on doit un ralentissement des investissements publicitaires moins brutal que prévu à la suite de l'éclatement de la bulle Internet et des réductions drastiques des budgets publicitaires des entreprises de la Netéconomie, voire de leur disparition. L'étude IAB-PricewaterhouseCoopers fait ainsi apparaître, pour le premier semestre 2001, un palmarès des secteurs annonceurs sur Internet sensiblement modifié par rapport à ceux des périodes précédentes : le premier secteur annonceur étant le secteur de la Vente Par Correspondance (avec 19% des investissements), suivi de la banque (12%).

Les nouveaux médias, en tête du classement des principaux annonceurs en 1999 avec 21%, reculent à la troisième place avec 10%. Ils sont suivis par l'informatique, leader en 1998, avec 9% et du secteur du tourisme et des voyages, également avec 9% des investissements réalisés sur Internet.

Selon Guillaume Buffet, Président de l'IAB France, " ce classement montre qu'Internet a su séduire de nouveaux annonceurs, plus traditionnels, plus exigeants. Cela prouve, en dépit de résultats globaux décevants, qu'Internet a vocation à se positionner comme le 6ème média à part entière ".

A ce classement pour le premier semestre 2001, il faut ajouter d'autres résultats qui confirment cette tendance pour qu'Internet soit définitivement considéré comme un grand média. Parmi la liste des 100 premiers annonceurs français, menant une stratégie pluri-médias, établie par AdNetTrack, le service de piges de la publicité en ligne développé par TNS Secodip, trois annonceurs sur quatre utilisent Internet comme média complémentaire. On y retrouve des entreprises aussi notoires que France Telecom, Bouygues Telecom, Cegetel SFR, IBM, Intel, Renault, Peugeot, Carrefour, Auchan, Leclerc, Procter & Gamble, L'Oréal, Danone, Perrier-Vittel, Universal Music, etc. Ce phénomène rappelle celui qu'ont connu les Etats-Unis, il y a plus de trois ans, lorsque les investissements dans les produits de grande consommation commençaient à talonner ceux réalisés dans les secteurs plus sensibles à Internet tels que le secteur de l'informatique.

Plus récemment encore, en décembre 2001, le Journal du Net a confirmé la maturité grandissante du média Internet en publiant une estimation des poids des annonceurs traditionnels en millions d'euros, pour les années 2000 et 2001 (sources : Benchmark Group, Jupiter MMXI). En 2000, sur un marché de l'e-pub de 145 millions d'euros, les annonceurs traditionnels représentaient 40 % des investissements. En 2001, sur une prévision de marché total de 146 millions d'euros, les annonceurs traditionnels en représenteraient près de 60 %, gagnant ainsi 20 points de " part de voix " sur Internet aux dépens des sociétés Internet et autres " dotcoms " (moteurs, annuaires, portails, Fournisseurs d'Accès à Internet, F.A.I., etc.).

L'évolution de la structure du marché de la publicité sur Internet est, également, indéniable si l'on compare, dans le temps, les chiffres de la pige publicitaire en ligne fournis gratuitement par la régie publicitaire Numeriland, sur le site Admorning. Admorning pige, depuis le mois d'avril 2001, l'essentiel des investissements publicitaires sur le Web français. Investissements réalisés sur 379 sites-éditeurs, en avril, et sur 383 sites-supports en décembre 2001.

La première conclusion est qu'une certaine stabilité règne dans le milieu des sites-supports, tout au moins en effectif, compte tenu des nombreuses disparitions de sociétés de la Netéconomie. Le 25 avril 2001, Admorning avait détecté 1 865 campagnes actives sur 24 972 au total. Le 29 décembre 2001, il n'y avait que 1 503 campagnes actives (sur un total de 42 332 campagnes recensées).

Cela confirme le ralentissement de l'activité cyberpublicitaire au deuxième semestre 2001 et laisse présager une baisse supérieure à 20% des revenus publicitaires sur Internet pour l'ensemble de l'année 2001. Rappelons, en effet, que de nombreux observateurs espéraient une embellie pendant les fêtes de Noël et de la nouvelle année (voir plus haut). Admorning a, par ailleurs, identifié 63 453 bannières différentes, le 29 décembre 2001, contre 35 363, le 25 avril 2001. Malgré un climat général morose, la publicité sur Internet conserve donc son dynamisme créatif en profitant des nouveaux formats pour éditer de nouvelles bannières.

Autre signe positif : le nombre d'annonceurs recensés a également augmenté passant de 4 224 à 5 872, d'avril 2001 à la fin décembre 2001, soit une augmentation de près de 40% du nombre des annonceurs sur Internet.

En conclusion et en dépit des différences statistiques, personne ne peut nier qu'Internet soit passé, en quelques années, du statut de média réservé à une minorité d'avant-gardistes à celui de grand média, soumis comme les autres, à la conjoncture économique.

3- Une évolution des formats vers plus de créativité et d'harmonisation

La créativité, dans le domaine des messages comme dans celui des formats, est souvent citée comme l'une des conditions du développement futur de la cyberpublicité.

a) Les principales formes de la cyberpublicité

Les statistiques publiées par l'IAB et PricewaterhouseCoopers, pour le premier semestre 2001, confirment trois tendances fortes :
  • la diminution de la part des bandeaux dans les revenus publicitaires sur Internet. Les bandeaux ont perdu leur situation passée de monopole : passant de 91,2%, en 1999, à 87, 5%, en 2000, et à seulement 75,5 % du montant total de la cyberpublicité au premier semestre 2001.
  • Le sponsoring connaît une progression remarquable : passant de 6,5% en 1999, à 10,2 % en 2000 et à 15% des revenus au premier semestre 2001. La marge de progression pour le sponsoring semble encore importante si l'on compare ce pourcentage aux 27% des revenus consacrés aux outils de sponsoring aux Etats-Unis (1er semestre 2000).
  • L'e-mail a également progressé au premier semestre 2001 et a atteint, en France, la part qu'il connaît aux Etats-Unis, soit 3% des revenus publicitaires (1er semestre 2000 aux Etats-Unis). Ce seuil sera donc difficile à dépasser d'autant plus que la réglementation européenne impose de nouvelles contraintes. Celles-ci pourraient même entraîner une baisse de la part de l'e-mail dans les dépenses cyberpublicitaires, en France, si les aménagements réclamés par les professionnels du marketing direct ne sont pas acceptés par les pouvoirs publics.
b) Les principaux formats des bandeaux

En matière de formats, l'IAB a conseillé, jusqu'en mars 2001, huit formats standards afin de faciliter la création et la mise en ligne des messages sur les sites choisis comme supports publicitaires :
  • le bandeau entier horizontal : 468 x 60 pixels, soit environ 12,5 cm par 2,5 cm et 10 Ko maximum
  • le bandeau entier avec barre de navigation verticale : 392 x 72 pixels
  • le demi-bandeau horizontal : 234 x 60 pixels et 5 Ko maximum
  • le bandeau vertical : 120 x 240 pixels
  • le bouton 1 : 120 x 90 pixels et 5 Ko maximum
  • le bouton 2 : 120 x 60 pixels
  • le bouton carré : 125 x 125 pixels
  • le micro-bouton : 88 x 31 pixels et 2 Ko maximum
En mars 2001, l'IAB a approuvé sept nouveaux formats dans le but de redynamiser le marché de l'e-pub, qui connaissait déjà quelques faiblesses, et de donner plus de liberté de création d'espace et d'opportunités aux annonceurs. Comparés à la bannière classique 468 x 60 pixels, les sept nouveaux standards devaient permettre, en effet, une meilleure occupation de l'espace écran :
  • le gratte-ciel vertical de 120 x 600 pixels
  • le grand gratte-ciel de 160 x 600 pixels
  • le rectangle (horizontal) de 180 x 150 pixels
  • le moyen rectangle (horizontal) de 300 x 250 pixels
  • le grand rectangle (horizontal) de 336 x 280 pixels
  • le rectangle vertical de 240 x 400 pixels
  • un carré pop-up de 250 x 250 pixels
c) Les nouvelles recommandations de l'IAB France

Cette multiplication des formats standards n'a pas eu les effets escomptés sur les investissements publicitaires comme nous l'avons vu. Elle a, par contre, jeté le trouble dans une profession malmenée par la conjoncture. Aussi, pendant près d'un an, l'IAB France a-t-il mené une enquête sur les formats utilisés auprès de l'ensemble des régies publicitaires.

Cette enquête a permis d'isoler les 10 principaux formats. Ces derniers furent alors soumis aux réactions d'un groupe de créatifs et d'un groupe d'éditeurs-supports. Des résultats de cette étude, l'IAB France a tiré les trois conclusions suivantes :
  • la nécessité d'harmoniser et de simplifier les formats publicitaires
  • l'obligation de réduire les contraintes techniques pour permettre une meilleure création publicitaire
  • l'indispensable recherche d'une proximité entre les formats utilisés sur Internet et ceux des autres médias pour favoriser la mise en place d'une stratégie pluri-média dont les avantages sont nombreux (voir notre article sur " L'efficacité et l'efficience d'une stratégie combinant Internet et les grands médias, L'Agora de la Cybermercatique, novembre 2001).
De manière à éviter le déclin du marché de l'e-pub, l'IAB France a donc formulé plusieurs recommandations qui vont dans le bon sens. Il est important de souligner que les acteurs du marché de la publicité sur Internet ne sont pas obligés de les respecter.

Sans doute pour éviter tout conflit inutile au sein de la profession, l'IAB France a même adopté le principe de l'homothétie selon lequel lorsqu'un site-support se trouve dans l'impossibilité d'héberger l'un des cinq formats de référence de l'IAB, tout format homothétique pourra être utilisé. Or, le dictionnaire Robert définit l'homothétie comme " une transformation géométrique qui, étant donné un point fixe O (centre, pôle d'homothétie) et un nombre k (rapport d'homothétie), fait correspondre à tout point M de l'espace un point M' tel que : OM' = kOM ". Aussi, ce principe d'homothétie adopté par l'IAB donne-t-il de la souplesse dans le respect des formats de référence et de la flexibilité aux différents intervenants qu'il s'agisse des créatifs, des annonceurs, des sites-supports, etc.

d) Les 5 formats de référence recommandés par l'IAB.

Après avoir élargi la palette des formats standards en mars dernier, l'IAB le réduit passant de 15 formats à 5 seulement. Les professionnels consultés considèrent que ces cinq formats peuvent répondre à la grande majorité des problématiques de communication formulées par les annonceurs. Parmi les cinq formats retenus, on retrouve trois anciens formats standards :
  • le carré 250 x 250 pixels
  • le grand gratte-ciel ou, en anglais, " skyscraper " : 160 600 pixels
  • et, bien sûr, la bannière ou bandeau entier horizontal, 468 x 60 pixels, qui demeure le format le plus utilisé malgré la concurrence de plus en plus vive des formats précédemment cités. Toutefois, afin de rajeunir le doyen des formats publicitaires, l'IAB recommande l'adoption d'un nouveau standard de poids qui passe de 10 Ko à 15 Ko, ce qui permet d'envisager des messages de meilleure qualité.
Les deux autres formats de référence retenus par l'IAB ne faisaient pas partie de la liste des 15 formats standards publiée en mars 2001. Il s'agit du :
  • 16/9ème, 320 x 180 pixels, en référence au format des téléviseurs et des DVD destinés à une bonne réception des films cinématographiques.
  • Le demi-skyscraper, 160 x 320 pixels.
e) Le Rich Média : une solution d'avenir ?

L'IAB France recommande, par ailleurs, d'utiliser les nouvelles technologies dites " rich-média " qui " ouvrent des possibilités de création beaucoup plus larges et garantissent une meilleure efficacité des campagnes tout en respectant les contraintes des éditeurs (poids des pages, etc…). "

Pour ce faire, l'IAB conseille aux sites-supports de s'ouvrir aux technologies rich-média telles que : Flash, Streaming video et " toute autre technologie permettant une meilleure interactivité et une meilleure expression créative ". Cette dernière recommandation est la conséquence de plusieurs études sur l'efficacité de la publicité en ligne dont les résultats furent présentés au cours de l'été 2001 (IAB, DoubleClick, MSN and CNET Networks Release Groundbreaking Online Brand Research Findings - Four Individual Studies Provide Extensive Data on The Effectiveness of Internet Advertising As A Branding Tool For Marketers On The Web - www.iab.net, july, 2001). Ces études concluent, notamment, que :
  • La publicité en ligne peut être utilisée efficacement en matière d'image.
  • Le Rich Média (audio, vidéo, flash, DHTML, etc.) permet un meilleur impact et agit très favorablement sur l'image (+ 194%).
  • Les interstitiels, entre deux pages Web, sont très efficaces en matière d'image.
  • Les nouveaux formats, notamment en Rich Média, sont plus performants que les bandeaux classiques et favorisent la construction et l'amélioration de l'image.
Faut-il, pour autant, conclure que l'avenir de la cyberpublicité ne passe que par le Rich Média ? Il faut rappeler que le Rich Média est une expression générique, pour ne pas dire fourre-tout, qui désigne tous les formats (bandeaux, interstitiels, superstitiels, e-mail, etc.) qui utilisent des techniques multimédias interactives (son, vidéo, flash, DHTML, etc.).

De plus, ses techniques évoluent très rapidement : ainsi, les chercheurs de France Telecom expérimentent actuellement un diffuser d'odeurs sur Internet (haut débit) qui donnera, sans doute, naissance aux premières campagnes publicitaires en ligne avec stimuli olfactifs… Les avantages des technologies Rich Média en termes d'efficacité et de créativité ne doivent pas cacher leurs limites : les problèmes de compatibilité avec l'équipement des internautes, la lourdeur des fichiers (de 50 Ko à plus de 200 Ko,) qui allonge les temps de téléchargement, le caractère intrusif notamment pour les " pop-up " et les " pop-under ", le coût de création plus élevé (au moins dix fois plus élevé que pour des bandeaux classiques), etc. Aussi, serons-nous plus prudent que certains avant d'affirmer que le Rich Média doit être la priorité en matière de création dans les agences Web et en matière de vente d'espaces pour les sites-supports.

Les techniques multimédias interactives génèrent des coûts que supporteront in fine les annonceurs. Par conséquent, ces derniers n'accepteront des efforts financiers que si les conditions de réception par leur cible sont remplies ( équipement adapté, haut débit, etc.), que si les sites-supports sont à même de véhiculer les messages Rich Média (d'où les recommandations de l'IAB à leur intention) et que si les campagnes dans les formats Rich Média ne provoquent pas des réactions collectives et/ou individuelles hostiles à la publicité. Or, la résurgence de la publiphobie, le développement des logiciels mangeurs de publicité comme toute autre forme de cyberconsumérisme ne sont pas à négliger par les professionnels de l'e-pub. Certains d'entre eux ne se sont-ils pas inquiétés des réactions critiques des internautes, notamment aux Etats-Unis, à la suite des campagnes Ford, au printemps 2001, sur Yahoo, jugées trop intrusives ?

Inquiétudes confirmées par une étude américaine, publiée en mai 2001, qui montrait que si le format " pop-up " assurait une meilleure visibilité, il pouvait jouer négativement sur l'image de l'annonceur (Beard, 2001). C'est pourquoi avant de conclure que le Rich média est la solution d'avenir de l'e-pub, il nous semblerait prudent de vérifier sérieusement, auprès des internautes français, si les nouveaux formats en Rich Média ne risquent pas de provoquer des effets négatifs sur l'image des annonceurs, sur l'image de la publicité sur Internet et, par voie de conséquence, sur les futurs comportements des internautes.

Yves Chirouze

Extrait de Cybermercatique magazine, 31 janvier 2002